La civilisation de la Tène par Victoria

21/11/2022

La proposition de distinguer au sein de l'âge du Fer deux faciès culturels, en les nommant Hallstatt et La Tène, émane du Suédois Hans Hildebrand en 1874. Cette terminologie originale deviendra très vite synonyme de premier et second âge du Fer. Le choix du nom de La Tène s'est imposé à la suite de nombreuses découvertes d'objets métalliques effectuées sur ce site, en particulier d'armes en fer, signalées à partir de 1857. L'adjectif dérivé " laténien " est utilisé depuis la fin du XXe s., en France plus particulièrement, pour qualifier tout ce que l'on peut rattacher avec plus ou moins de certitude aux Celtes du second âge du Fer.

Origine et source

Les sources archéologiques à disposition varient au cours des siècles et d'une région à l'autre. D'une manière générale, le mobilier funéraire (éléments de vêtements, parures, armes, objets d'accompagnement) et leur organisation à l'intérieur de la sépulture, constituent un réservoir privilégié dans lequel les archéologues vont puiser les informations sur lesquelles reposent leurs interprétations. En Suisse, les premiers témoignages laténiens, soit l'expression d'un art nouveau alliée à l'apparition de nouveaux types d'objets, interviennent comme une rupture certes, au sein toutefois d'un environnement hallstattien: il s'agit en effet de parures provenant d'inhumations secondaires (dites adventices) à l'intérieur de tumulus du premier âge du Fer, dans la région du Jura et sur le Plateau suisse. Très vite, dès la seconde moitié du Ve s. av. J.-C., vont se généraliser de nouvelles pratiques funéraires : des inhumations toujours, mais en tombes plates regroupées en nécropoles sur des sites nouveaux.

Certaines d'entre elles seront fréquentées jusque dans la première moitié du IIè siècle avant J.-C.

Crédit photo : site Wikivaud

Habitat et société


La société laténienne reste fondamentalement une société d'agriculteurs et d'éleveurs, dans le prolongement du mode de vie des périodes précédentes. Malgré les fouilles extensives liées aux travaux autoroutiers de la fin du XXe s., les campagnes sont peu connues. Pour La Tène ancienne, quelques maisons sur poteaux avec des parois de clayonnage, des greniers de stockage surélevés (par exemple à Alle), des silos (par exemple à Gelterkinden ou Orbe), ainsi que des constructions, en général à une nef, sur des solins de pierre dans les Alpes. A la fin de La Tène, les bâtiments sur sablières basses sont plus fréquents sur le Plateau (par exemple à Pomy-Cuarny).

Dans la foulée des concentrations de l'habitat et des activités en agglomérations ouvertes dès le IIe s. av. J.-C., les premiers centres de type urbain, les oppida (Oppidum), présentent une organisation en quartiers, avec des spécialisations artisanales (forgerons, céramistes entre autres), la production de la monnaie (un coin monétaire destiné à frapper des quinaires dits de Kaletedou a été mis au jour au Mont Vully), des espaces à vocation cultuelle, des sanctuaires. Ces oppida sont surtout fortifiés par un puissant rempart de terre armée de bois et de parements de pierre sèche, dont les deux variantes principales sont le Pfosten Schlitz Mauer, mur à poteaux frontaux, mur à poutraison horizontale (Yverdon-les-Bains-Sermuz).

L'oppidum le plus important de la Suisse actuelle (en fait du Plateau, ce type de ville n'étant pas représenté dans les Alpes) qui soit attribué aux Helvètes est celui de Berne, sur la presqu'île de l'Ange. Les autres sites qualifiés d'oppida n'ont sans doute pas tous exercé le même rôle politique, économique, religieux, certains ayant peut-être une vocation plus défensive ou de rassemblement. D'autres habitats ouverts, à l'instar du célèbre site de la Gasfabrik à Bâle, offrent une image fournie de toutes ces activités.

Art et histoire


Les différents modes d'expression artistique (les styles déjà mentionnés) qui se succèdent au cours de La Tène, avec les masques humains, les figures d'animaux mythiques, les motifs géométriques ou d'inspiration végétale avec leur cortège de lyres, d'esses, de rinceaux et d'entrelacs sont difficilement dissociables d'une composante religieuse, omniprésente. Certains symboles devaient être revêtus d'une valeur reconnue dans la plus grande partie du monde celtique laténien, tout comme les pendentifs et amulettes que l'on trouve associés aux sépultures de certains individus. De même dans les habitats, le religieux et le cultuel sont intimement mêlés aux aspects de la vie quotidienne.


Les amas d'objets sont considérés comme représentatifs de lieux à vocation cultuelle, voire lieux d'offrandes et de sacrifices. En effet, l'abondant dépôt de la Tiefenau sur l'oppidum de Berne-Enge présente une série d'objets (armes, fragments de chars, parures, etc.) manipulés, abîmés, brisés, pliés, en un mot sacrifié au IIIe s. av. J.-C. et rendus inutilisables à un usage profane, mais peut-être consacrés pour être dédiés à une divinité. Les trouvailles du siècle dernier en milieu humide, à commencer par celles du site même de La Tène ou du site de Port, sont aujourd'hui interprétées comme des dépôts intentionnels d'offrandes, dans un contexte comparable à celui des sanctuaires du nord de la France notamment. Les trouvailles du pont de Cornaux-Les Sauges sont également rapportées par la majorité des chercheurs à ce genre de pratiques. De tels lieux consacrés ont fonctionné au cours des IIIe et IIe s. av. J.-C., selon un rythme et des règles propres à chacun et qui nous échappent. On rencontre des dépôts plus modestes à Wauwil, ou des trésors monétaires du IIe ou du Ier s. av. J.-C., dont l'amas calciné de 17 000 à 18 000 monnaies de potin du type dit zurichois (ou à l'ancre) découvert sur le site de Zürich-Alte Börse. Le célèbre trésor d'Erstfeld, au débouché des Alpes, enfoui vers 400 av. J.-C., est lui aussi interprété dans le même sens votif. Le site mis au jour en 2006 au Mormont semble avoir été un lieu de culte d'importance majeure.

Les données proprement historiques concernant la période de La Tène, comme celles issues du domaine religieux, se superposent en grande partie à l'histoire des Celtes. On évoquera pour terminer les célèbres migrations, ou les déplacements plus modestes de groupes humains qui ont rythmé un peu moins de cinq siècles de civilisation laténienne.

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